Ce projet de recherche interdisciplinaire et participatif est issu d’une sollicitation des chercheurs de l’Atelier d’Écologie Politique de Toulouse (Atécopol) par le collectif APROVA à propos de l’impact sur la nappe phréatique de l’activité de gravières.
Il était une fois, NAPALAIR
Une recherche à l’interface sciences / société
À l’automne 2022, après un été particulièrement chaud et sec caractérisé par des rationnements d’eau décrétés par les autorités publiques, des citoyens et citoyennes d’Ariège ont sollicité des universitaires toulousains pour monter une recherche autour de l’impact des gravières sur la ressource en eau.
Ces habitants et habitantes du territoire, membres de l’association APROVA, s’inquiètent depuis longtemps de l’extension d’activités d’extraction de granulats au détriment des terres agricoles, et mettant en péril, selon eux et elles, l’eau souterraine, tout en transformant brutalement le paysage rural.
Désireuses de travailler en interdisciplinarité entre sciences naturelles et humaines, à l’interface science/société, nous avons monté une équipe, cherché un financement et élaboré un projet de recherche. NAPALAIR est ainsi un projet de recherche interdisciplinaire, à cheval entre les sciences de l’environnement (université Paul Sabatier) et les sciences sociales (université Jean Jaurès).
Assumer la complexité
L’objectif du projet NAPALAIR consistait à démêler la pelote de fils d’une situation complexe de fragilisation de la ressource en eau en basse Ariège. Certains militants nous disaient : « la situation est on ne peut plus simple : les gravières détruisent la nappe ». Inutile, d’après eux, de chercher à compliquer les choses.
Mais complexe n’est pas synonyme de compliqué. Complexe, c’est ce qui est tissé ensemble. Séparez les fils d’un tapis et vous perdrez aussitôt le motif entier que l’entrelacement des fils formait. « Nous avons trop bien appris à séparer ; il vaut mieux apprendre à relier » nous dit le philosophe Edgar Morin, qui a consacré la quasi-totalité de son œuvre à l’étude de la complexité. Ainsi, pour relier les humains et les écosystèmes par-delà nos disciplines scientifiques spécialisées, nous avons choisi de revisiter 3 représentations courantes :
- Représenter l’invisible : Comment comprendre le fonctionnement d’une nappe phréatique et la représenter ? La représentation courante d’une nappe phréatique comme une poche d’eau souterraine est-elle valable?
- Décrire le métabolisme du territoire : Quelle est la destination des flux de granulats ? À qui cette extraction profite-t-elle? Et, à l’inverse, d’où proviennent les déchets que l’on utilise pour remblayer les plans d’eau ainsi créés ?
- Questionner le paysage rural et les rapports que les habitant.e.s entretiennent avec lui : L’extension des gravières porterait atteinte à un paysage agricole considéré comme traditionnel et familier. Mais de quand date ce paysage agricole, fortement remanié par le remembrement et la monoculture intensive de céréales destinées à l’export ? Pourquoi l’extraction de granulats est-elle perçue comme plus néfaste ?
Une question socialement vive
Un choix méthodologique fort : Nous n’avons pas cherché à produire de nouvelles données quantitatives. Nous avons concentré nos efforts sur la synthèse et l’analyse interdisciplinaire de la très abondante documentation disponible sur le sujet. 135 documents ont été synthétisés pour aboutir au contenu de l’exposition.
Rencontrer les acteurs et actrices du territoire : Afin de recueillir une multiplicité de points de vue sur la question, nous avons procédé à une cinquantaine d’entretiens qualitatifs semi-directifs avec des acteurs et actrices du territoire. Inclure plusieurs points de vue permet de neutraliser les biais de chacun et ainsi de construire une forme d’objectivité scientifique.
Ce que nous n’avons pas pu faire : Plusieurs acteurs-clé n’ont malheureusement pas donné suite à nos demandes d’entretien, c’est en particulier le cas de : 3 carriers sur 4 (Denjean Granulats, Sablières Malet, Midi Pyrénées Granulats), leur syndicat professionnel UNICEM, la DREAL, la Préfecture de l’Ariège, le Conseil Général de l’Ariège.
Il faut dire que la question des gravières est sensible sur le territoire et que, pendant la durée de notre enquête, l’actualité a été agitée. Nous avons donc fait de notre mieux pour naviguer dans ces eaux agitées, mais l’enquête pâtit de n’avoir pas pu recueillir ces points de vue sur la question.
Chronologie de la controverse
Muriel Dutrait
Construite à partir d’éléments issus d’une enquête, des entretiens et recherches documentaires.
La frise débute en 2009, car c’est à ce moment-là que les premières alertes et contestations sont énoncées publiquement par les associations environnementales, notamment par APRA-« Le Chabot » et APROVA. La chronologie s’arrête en 2024, mais la controverse est encore en cours.
Cette frise identifie quatre ensembles de faits qui constituent des points de bascule dans la controverse :
- le changement d’échelle de l’extraction des granulats en basse Ariège, faisant passer le nombre de d’entreprises de 2 à 4, et qui se caractérise par l’augmentation de la taille des exploitations et du volume de l’extraction ;
- l’entrée des déchets inertes dans la controverse avec l’autorisation de leur enfouissement dans les ICPE (Installations Classées pour la Protection de l’Environnement) ;
- le positionnement des collectivités locales contre le nouveau Schéma régional des carrières ;
- la création de Stop Gravières et les nouvelles formes de contestations militantes.
La frise s’organise autour de 5 thématiques dont on peut lire les éléments en parallèle :
- les gravières sur le territoire de Basse-Ariège,
la réglementation des gravières et de certains éléments d’aménagement du territoire,
les études scientifiques,
les outils de gouvernance : enquêtes publiques et processus de concertation,
les alertes, la contestation.
Cette chronologie n’a pas la prétention d’être exhaustive, ni totalement objective, puisque, bien que s’appuyant sur une enquête de terrain, sa mise en forme constitue un récit dans lequel l’autrice fait le choix de visibiliser certains aspects plutôt que d’autres.
Plaquette pédagogique eau souterraine
Infographie de ressources en ligne sur l’eau
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