Dans une étude impliquant 1022 patients souffrant de Covid long, les chercheurs de la cohorte ComPaRe (Communauté de Patients pour la Recherche), dirigée par le Pr Philippe Ravaud, Université Paris Cité / AP-HP / Inserm, ont utilisé une méthode originale pour développer et valider la première mesure scientifique de la sévérité de la maladie et de son impact sur la vie des patients.

Le « covid long » est le terme utilisé par les patients pour décrire l’ensemble des manifestations tardives survenant après une infection par le virus SARS-CoV-2. Selon l’Office National des Statistiques au Royaume Uni, environ une personne sur 10 infectée continue d’avoir des symptômes 12 semaines après le début de son infection. Les causes de la persistance des symptômes sont multiples. On constate par exemple les séquelles d’organe suite à la phase aigüe de la maladie (cicatrices pulmonaires, complications de la réanimation, etc.), le stress post-traumatique lié à la maladie ou à sa prise en charge, la persistance virale ou le syndrome de fatigue post-viral. Chez un individu donné, plusieurs causes sont souvent mêlées et responsables de tableaux cliniques complexes.
Jusqu’à présent, les études scientifiques estimant le nombre de patients présentant des symptômes persistants de la Covid utilisaient chacune une définition différente de la maladie. L’hétérogénéité des mesures utilisées a donc pu contribuer aux discordances entre les résultats des études.
Pour répondre à ce problème, le centre d’épidémiologie clinique de l’hôpital Hôtel-Dieu AP-HP, dirigé par le Pr Philippe Ravaud, Université Paris Cité /AP-HP / Inserm, a lancé fin 2020 une étude sur le Covid long au sein de la cohorte ComPaRe, la Communauté de Patients pour la Recherche portée par l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris et Université Paris Cité. Cette étude visait à développer une mesure scientifique de la sévérité de la maladie et de son impact sur la vie des patients selon une méthode en deux phases.
Au cours de la première phase (octobre – novembre 2020), les chercheurs ont interrogé 492 patients [âge médian 45 ans, 84% de femmes, 43% avec une infection confirmée par PCR] avec un covid long (défini comme la présence symptômes persistants au moins 3 semaines après une infection par le SARS CoV2). Les patients ont pu rapporter, en texte libre, l’ensemble de leurs symptômes et les facteurs déclenchants et calmants de ceux-ci. Les patients étaient également interrogés sur l’impact de la maladie sur leur vie. Les réponses des participants ont été analysées par des chercheurs et des patients experts. Elles ont permis la définition d’une liste de 53 manifestations de la maladie (fatigue, douleurs thoraciques, maux de tête, troubles de l’équilibre, etc.) et de six domaines de la vie des patients qui pouvaient être impactés par celle-ci (vie familiale, professionnelle, etc.).
Lors de la seconde phase (novembre 2020 – février 2021), les chercheurs ont utilisé ces résultats pour développer un questionnaire, rempli directement par les patients, afin de mesurer la sévérité de la maladie et son impact sur la vie des patients. Ils ont évalué la validité, la fiabilité et la pertinence de ce questionnaire dans un second échantillon de 1022 patients avec un Covid long [âge médian 45 ans, 79% de femmes, 55% de patients avec une infection confirmée par PCR, 12% ayant été hospitalisés]. Cette seconde phase a montré l’impact majeur du covid long sur la qualité de vie des patients, estimée environ 40% inférieure à celle de la population générale. Ainsi, 77% des patients considéraient l’impact de leur maladie comme « insoutenable » et 48% déclaraient ne plus être capables de réaliser certaines activités chez eux ou dans le cadre de leur travail.
En conclusion, cette recherche a permis le développement d’une base scientifique de qualité pour mesurer le covid long. La standardisation des mesures dans les études scientifiques permettra de comparer et combiner les résultats de celles-ci.
La mesure développée est actuellement utilisée pour évaluer l’évolution au cours du temps des symptômes des patients de l’étude ComPaRe Covid long. Ceci permettra de comprendre les variations des manifestations de la maladie au cours du temps et de permettre de répondre à la question « combien de temps dure la maladie ? ».
Afin de répondre à ces questions de recherche, ComPaRe renouvelle son appel à participation aux projets de recherche sur le Covid long menés au sein de la cohorte. Pour participer, il suffit de s’inscrire ici.
Créée en 2017 par l’AP-HP, ComPaRe, la Communauté de Patients pour la Recherche rassemble aujourd’hui plus de 45 000 patients volontaires partout en France. Ils contribuent à faire avancer la recherche sur leur(s) maladie(s) chronique(s) en répondant régulièrement aux questionnaires en ligne des chercheurs, sur la plateforme dédiée.
Aujourd’hui, 36 projets spécifiques ont été lancés dans ComPaRe. Outre le covid long, plusieurs études spécifiques ont été lancées pour suivre les patients souffrant de diabète, de maladie de Verneuil, de vitiligo, de lombalgie chronique, de maladies rénales, de vascularites, d’hypertension artérielle, d’endométriose, de neurofibromatoses et d’un syndrome de Marfan. De nouvelles études et cohortes spécifiques sont en cours de constitution.
Référence
Development and validation of the long covid symptom and impact tools, a set of patient-reported instruments constructed from patients’ lived experience : Viet-Thi Tran, Caroline Riveros, Bérangère Clepier, Moïse Desvarieux, Camille Collet, Youri Yordanov, Philippe Ravaud. Clinical Infectious Diseases
Pour en savoir plus
- Étude ComPaRe sur le « fardeau du traitement » : près de 40% des patients chroniques estiment ne pas être en mesure de supporter, sur le long terme, la charge de leurs soins (octobre 2019)
- Etude ComPaRe « Si vous aviez une baguette magique, que changeriez-vous dans votre prise en charge ? » : plus de 1600 patients atteints de maladies chroniques proposent près de 150 pistes d’amélioration (avril 2019)
- Communauté de Patients pour la Recherche de l’AP-HP : appel à la participation pour faire avancer la recherche médicale sur les malades chroniques (octobre 2018)
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